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24 janvier 2022

Baloon comme illustration de l’antifragilité

Retrouvez ici l’article complet : “Agilité, digital et antifragilité : les trois clés de la réussite de Baloon, la start-up qui dompte l’incertitude sur le marché de l’assurance en Afrique”

Source : Africapresse.Paris – https://www.africapresse.paris/Agilite-digital-et-antifragilite-les-trois-cles-de-la-reussite-de-Baloon-la

Merci à Soufyane Frimousse et Christine Dugoin-Clément pour cette étude et à AfricaPresse.Paris pour sa parution.

Créée en 2017, Baloon est une jeune pousse devenue le premier courtier digital panafricain en assurances. Surmontant la double défiance traditionnelle assureurs/assurés, l’entreprise a de plus réussi la performance de prospérer en pleine crise pandémique. Comment expliquer ce succès dans un contexte aussi mouvant que risqué ?

Une contribution de Soufyane FRIMOUSSE
Maître de conférences, HDR IAE de Corse
Chercheur associé Essec Business School et HEC Montréal.

et de Christine DUGOIN-CLÉMENT
Docteur en science de gestion, Professeur affilié à l’IAE de Paris, membre des cercles de réflexion Cape Europe, Aters et du conseil scientifique de l’Observatoire de l’Intelligence économique

Soufyane Frimousse et Christine Dugoin-Clément

De nombreux phénomènes imprévisibles déséquilibrent les sociétés provoquant des crises, des points d’arrêt qui peuvent menacer de tout submerger et d’entraîner l’humanité entière dans un tourbillon infernal. Une des approches est de minimiser les conséquences de ces cygnes noirs. Puisqu’il est impossible de les éviter et de prédire leur survenance, il convient de prendre des mesures pour réduire leur impact et s’appuyer sur eux afin de se transformer.

En fait, il s’agit d’adopter de nouvelles formes d’équilibre. C’est ici que l’antifragilité prend tout son sens. Penser l’antifragilité permet de comprendre certaines organisations africaines, qui, plus que toutes autres, sont au cœur de changements permanents.

Confiance et numérique au service de la performance

Prenons l’exemple de Baloon qui est une une start-up créée en 2017. Baloon est le premier courtier digital panafricain en assurances. Le contexte incertain évolutif et risqué que représentent les pays africains a été un point bloquant, voire un facteur rédhibitoire au développement de l’assurance des particuliers.

De nombreuses entreprises qui se sont lancées n’ont pas su adopter une stratégie novatrice et adaptée au contexte : empreintes d’approche fondée sur des schémas inadaptés à cet environnement, elles n’ont pas su regarder en avant et adopter de nouveaux points d’équilibre.

Ce contexte mouvant s’ajouterait à une défiance réciproque des assurances et des assurés, qui aurait encore entravé le développement de ce secteur. Alors que les uns craignent la fraude, les détournements et les impayés, les autres redoutent de payer des primes d’assurances sans jamais être remboursés en cas de sinistre. Alors comment expliquer cette success story ?

Loin d’attirer les assurances à l’attention des particuliers, les pays africains sont généralement considérés comme très difficiles et risqués pour ce type d’activité. Pourtant, Bertrand Vialle, fondateur de Baloon, en est sûr : sous réserve de rester fidèle à son savoir- faire et à ses valeurs, les pays africains représentent un véritable potentiel pour une société d’assurance.

Par définition, l’assurance a besoin d’un contrat de confiance pour pouvoir fonctionner. Fort de ce constat, Bertrand Vialle affirme son choix : « Ma vision, c’était de dire je vais mettre de la transparence. Lutter contre la fraude et les impayés pour les assureurs, et pour les assurés, faire que les sinistres soient remboursés. Ma mission, ça va être ça. »

Les résultats affichés par Baloon témoignent de la pertinence de son approche. Là encore, le décideur a été en capacité de comprendre son environnement et de s’y adapter rapidement, de sortir des sentiers battus de son secteur d’activité pour adopter une approche novatrice, un nouvel équilibre adapté à la fois à son expertise, à ses valeurs et à son environnement.

Si la société n’affiche pas un franc CFA d’arriérés, c’est notamment parce qu’elle a pris le parti d’utiliser l’e-monnaie. Si ce mode de paiement est encore regardé avec suspicion par les entreprises et industries héritières d’une tradition ancienne, il a permis de limiter le risque de détournement inhérent au cash, de bénéficier de l’immédiateté des paiements et de la traçabilité des flux financiers.

Des collaborateurs qui osent : le droit à l’erreur et à l’échec, moteur de l’antifragilité et de l’équilibre instable.

La hiérarchie des valeurs de Baloon est cohérente avec l’approche illustrant l’équilibre instable compris comme une stratégie d’entreprise et, peut être plus encore, avec l’antifragilité.

De fait, cette démarche implique de tester, de se donner un temps pour tester, même si ce test ne donne rien. Il pourra peut-être permettre d’avoir cette option là plus tard, ou de penser d’autres approches. Cette approche est même fortement répandue auprès de tous les collaborateurs : « Dans leur tête il faut que ce soit très clair : il faut qu’ils s’amusent, qu’ils testent ! »

Et c’est important car au sein de Baloon, les équipes sont « en adaptation permanente ». Le résultat, c’est de ne pas craindre les situations extrêmes, comme c’est le cas de certaines autres structures plus lourdes : « Il y a des incertitudes et on le sait. Alors quand une crise comme la Covid arrive on se dit juste : bon, ce n’est pas si grave, on va s’adapter, on va changer, on sait le faire ».

Il ne s’agit pas là de faire preuve d’inconstance ou d’une légèreté excessive. Au contraire, le cas de Baloon montre que l’antifragilité et l’équilibre instable accroissent la confiance de l’ensemble des partenaires dans leur capacité à gérer l’incertitude, la volatilité et le risque, réduisant ainsi l’effet de saisissement, de stupeur ou de découragement dont les effets démultiplient les conséquences néfastes des situations extrêmes et des crises sur les entreprises qui n’y sont pas préparées.

En pratique, l’effet collatéral de cette approche est de limiter la communication destinée à rassurer les agents, à normaliser une situation qu’ils perçoivent comme radicalement dangereuse et difficilement tolérable. Cette économie substantielle représente un gain de temps non négligeable quand il faut pouvoir réagir rapidement, d’énergie pour les chargés de communication, et d’argent pour l’entreprise qui doit assurer la diffusion en interne de communication spécifique.

Gagner des parts de marché en pleine crise Covid

La crise de la Covid aura quasiment représenté une opportunité. Au rebours du coup de frein général dont ont souffert la plupart des acteurs économiques, Baloon a réussi la performance de poursuivre son développement et même de gagner des parts de marché.

La bonne santé de Baloon n’a pas laissé de susciter l’étonnement, voire une certaine incrédulité, des entreprises tétanisées sur les processus anti-crise traditionnels.

L’explication repose sur la mise en pratique de deux options résolument appliquées : l’agilité qui a permis un virage à 180° sur les prospects initiaux, et la digitalisation réelle qui en a fait une structure totalement dématérialisée. Pourtant, en dépit ou grâce aux atouts tirés de sa digitalisation, c’est à son opportunisme et à son antifragilité que Baloon a pu prospérer dans cette période dangereusement incertaine.